Collaboration entre enquêteur et les interprètes
L’auteur de cet article travaille depuis de nombreuses années auprès de la sûreté dans le domaine des stupéfiants. Il est compétent en matière de lutte contre la criminalité liée aux stupéfiants dans la région de Berne. Parmi son cahier des charges figurent notamment les enquêtes, les arrestations et les auditions. La question de la barrière de la langue se pose souvent dans le cadre d’auditions: comment la surmonter lorsqu’une personne ne parle pas l’allemand? L’enquêteur nous présente la collaboration avec les interprètes, qui sont la clé de la solution.
Mener des auditions s’inscrit dans le quotidien d’un enquêteur. Les dépositions de personnes prévenues, lésées et appelées à donner des renseignements contribuent à faire avancer les enquêtes de la police. Nombre de personnes entendues ne parlent pas suffisamment l’allemand. Une bonne collaboration entre les enquêteurs et des interprètes qualifiés est donc essentielle pour surmonter la barrière de la langue, éviter les malentendus et assurer une communication efficace dans les affaires de poursuite pénale.
Au-delà de la barrière
Les interprètes à la police ont pour mission de faire disparaître la barrière de la langue entre l’enquêteur et la personne entendue. Ils doivent non seulement maîtriser la langue, mais avoir le bagage culturel nécessaire pour assurer une traduction exacte et complète. Si une déposition est mal traduite, des informations importantes peuvent se perdre, voire mener à des erreurs dans la poursuite pénale. Les interprètes doivent êtres neutres et impartiaux afin de traduire avec précision et conformément à la vérité les entretiens et auditions entre personnes suspectes et autorités de poursuite pénale. Ils ne donnent pas leur avis, ne déforment pas les propos et se bornent à faire passer un message d’une langue à l’autre, en traduisant correctement et de façon neutre. Ils travaillent de manière discrète et veillent à ce que les informations traduites soient traitées de manière confidentielle.
La collaboration avec les interprètes permet à la police d’interroger des personnes parlant différentes langues. Les faits sont ainsi souvent plus complets, ce qui contribue à l’élucidation d’infractions.
Communication claire
Afin de surmonter d’éventuelles difficultés et d’assurer la qualité des investigations, une communication claire et une bonne collaboration entre l’enquêteur et l’interprète sont essentiels. En vertu de la maxime de droit «audiatur et altera pars» (lat. «entendre l’autre côté»), la police est tenue de faire appel à un ou une interprète lorsque la barrière de la langue empêche de comprendre la personne entendue. Bien que l’organisation d’un ou d’une interprète demande du temps et des ressources supplémentaires, cela est la plupart du temps indispensable pour assurer une communication efficace entre la personne entendue et celle menant l’audition.
La durée d’une audition varie et dépend de nombreux facteurs, notamment de la complexité du cas, du nombre de questions posées et, selon l’ampleur de la traduction, de la présence d’un ou d’une interprète. En impliquant rapidement un ou une interprète, il est possible de gagner du temps et d’assurer, dès le départ, une communication claire et correcte entre les parties.
Il peut se révéler difficile de trouver un interprète en temps utile lorsque la langue en question est peu parlée en Suisse comme le tibétain, l’éwé* ou le géorgien.
Refus de déposer: pourquoi faut-il tout de même un ou une interprète
Il est important que les droits de la personne prévenue, y compris le droit d’être entendu prévu dans le Code de procédure pénale suisse, soient respectés même si une personne fait valoir son droit de refuser de déposer ou ne donne que peu d’informations. Les interprètes traduisent non seulement les réponses mais aussi les questions. Dans le cadre d’une audition, la personne entendue doit comprendre ce qui lui est demandé même si elle décide de se taire. De plus, la présence de l’interprète permet à la personne prévenue d’expliquer son point de vue ou ses motifs de refus de déposer. Ainsi, la police comprendra davantage la situation, surtout lorsqu’il y a une barrière linguistique ou culturelle.
Souvent, une audition ne peut avoir lieu qu’en présence d’un ou d’une interprète. Cela permet de garantir le droit d’être entendu à la personne interrogée et de permettre à l’enquêteur ou l’enquêtrice d’entendre un grand nombre de personnes de langue étrangère.
Qui interprète aux auditions à la Police cantonale bernoise? Quels sont les devoirs des personnes endossant cette tâche importante et quels sont les défis dans leur travail au quotidien? Vous en apprendrez plus dans le prochain article du blog.
Article 68 Traductions du Code de procédure pénale suisse
1 La direction de la procédure fait appel à un traducteur ou un interprète lorsqu’une personne participant à la procédure ne comprend pas la langue de la procédure ou n’est pas en mesure de s’exprimer suffisamment bien dans cette langue. Pour les affaires simples ou urgentes, il peut être renoncé à une telle mesure, pour autant que la personne concernée y consente et que la direction de la procédure et le préposé au procès-verbal maîtrisent suffisamment bien la langue de cette personne.
2 Le contenu essentiel des actes de procédure les plus importants est porté à la connaissance du prévenu oralement ou par écrit dans une langue qu’il comprend, même si celui-ci est assisté d’un défenseur. Nul ne peut se prévaloir d’un droit à la traduction intégrale de tous les actes de procédure et des pièces du dossier.
3 Les pièces qui ne sont pas produites par les parties sont, si nécessaire, traduites par écrit ou oralement; dans ce dernier cas, elles sont consignées au procès-verbal.
4 L’interrogatoire d’une victime d’une infraction contre l’intégrité sexuelle doit être traduit par une personne du même sexe que la victime si celle-ci le requiert et que la procédure n’en est pas indûment retardée.
5 Les dispositions relatives aux experts (art. 73, 105 et 182 à 191) s’appliquent par analogie aux traducteurs et aux interprètes.
* L’éwé est parlé par le peuple du même nom, qui vit dans le sud du Ghana et du Togo. Il s’inscrit dans les langues nigéro-congolaises.
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